C’était chouette Maupiti! Ces deux semaines n’ont pas été de trop, même si le temps s’est un peu gâté -entendre: il a plu de temps en temps – nous nous sommes imprégnés jusqu’au bout de la beauté du lieu et de la gentillesse des habitants. Ce n’est pas toujours évident de briser la glace avec les Polynésiens, qui paraissent au premier abord cordiaux mais distants: ils ne viennent pas spontanément nous parler, et on peut très vite se sentir exclus au milieu de la place du marché. Mais il faut revenir, s’assoir, attendre; puis on est accepté et les échanges commencent: on passe du statut de « touriste de passage » à celui de « touriste qui va rester un peu plus longtemps ». Être sur un bateau, ça permet d’être indépendant, mais parfois un peu trop, et on a finalement peu de contacts avec la population locale, habituée aux bateaux de charters qui traversent les lagons en coup de vent.
Nous avons vécu de beaux échanges notamment la veille de notre départ, samedi 2 novembre, sur le motu devant lequel nous étions mouillés. Toutes les semaines, les pensions qui hébergent les touristes – il n’y a pas d’hôtel à Maupiti – organisent des repas partagés sur les motus:
un four tahitien est creusé, des plats traditionnels préparés dans des paniers en palmes, des grandes tables sont alignées sur le sable, c’est très sympa!
J’ai négocié avec l’organisatrice pour que nous puissions y participer, et nous n’avons pas été déçus de l’accueil: nous découvrons de nouvelles saveurs -gelées de citrouille pour Halloween -, participons à un atelier de tressage de paniers, à un autre d’ouverture de noix de coco, les filles passent l’après-midi à jouer avec les enfants de nos hôtes dans le lagon, et j’ai même le plaisir de jouer du ukulele avec le groupe, composé sur frère, du beau-frère, des cousines et de la grand-mère de Nini, l’organisatrice!
Si au début tout ce beau monde joue pour les touristes, ça se transforme vite en « boeuf » où le plaisir de jouer et chanter ensemble prend le dessus: je suis assise à côté d’un guitariste qui me souffle les accords que je frappe sur l’instrument prêté (oui, ici on frappe le ukulele…), mais finalement on tourne sur les 4 mêmes accords, et c’est une vraie joie pour moi de participer à cette musique festive et généreuse. Mon voisin n’est ni touriste, ni de la famille de Nini; il est de Raiatea et a traversé jusqu’à Maupiti sur le petit bateau à moteur d’un ami pour suivre l’Hawaiki Nui; il connaît les musiciens, et il s’est joint avec ses amis à cet après-midi convivial. Ah oui, et sa fille est aiguilleuse du ciel à l’aéroport du Versoud. En face de chez nous, où Vincent va faire du planneur. It’s a small world after all…
Nous regagnons le bateau vers 17h après avoir recueilli quelques recettes de Mamie et de Nini, fourbus ( et un peu éraflée pour Cécilie qui a sauté trop près d’une patate de corail) mais bien contents de ces échanges!
L’Hawaiki Nui a donc eu lieu, la fameuse dont tout le monde nous parle depuis notre arrivée: LA course de va’a à 6 rameurs des îles sous le vent, qui s’étale sur trois jours et relie Huahine à Bora Bora. Nous avons suivi la dernière journée à la télévision, et apprécié le départ en trombe dans le lagon de Tahaa: surtout sous des trombes d’eau… Même les caméras étaient mouillées, et le commentateur n’osait pas sortir son Iphone pour chronométrer le temps qui séparait le leader des autres concurrents… D’ailleurs c’est le bateau Shell qui a gagné, mais tout le monde le savait avant le départ: « c’est quoi votre plan de course? – on va suivre le leader, c’est plus sûr », qui a effectivement tous les renseignements nécessaires: des pêcheurs sont éparpillés sur les différentes routes possibles et donnent des informations en temps réel sur les courants et la houle aux différents endroits au staff, qui suit le va’a en bateau à moteur et lui communique la route à prendre. C’est une performance physique assez folle, et qui est suivie par tous les archipels, chacun envoyant au moins un bateau de représentants – il y en a même un de Marseille, et un autre de Vaux-en-Velin!
Nous nous décidons enfin à quitter notre île paradisiaque dimanche 3 novembre, non pas pour les Tuamotus, mais pour Raiatea: il y a besoin de refaire des coutures sur le génois et la Grand Voile (plus d’explications dans un prochain article), nous prenons contact avec un voilier, qui peut s’en occuper cette semaine. Nous appareillons à 5h30, admirons une dernière fois des couleurs magnifiques du lever de soleil sur les arêtes de l’île, prenons la passe sans courant ni vague, et … hissons le spi! Il y a eu une belle bascule dans les alizées, et nous profitons d’un très rare vent d’ouest pour partir vent arrière! Quel luxe de voyager au rythme des vents… Navigation calme, avec une houle très faible, nous doublons Bora vers 11h, puis le vent tourne petit à petit, devenant sud; nous affalons le spi pour sortir le génois et la grand’voile. Nous naviguons entre les grains, ce qui nous permet d’en prendre le vent et de pousser une pointe de vitesse à 8 noeuds, du jamais vu encore pour nous avec Fakarêver (on n’a eu que des fenêtres avec peu de vent pour l’instant!). L’arrivée à Raiatea se fait sans encombre, accueillis par un bel arc-en-ciel, et nous retrouvons avec joie ces belles falaises et ces sommets verdoyants à 1000 mètres!
Nous retrouvons également Quasar, un joli monocoque à l’intérieur tout en bois, rencontré à Maupiti: Laura et Yann, jeune couple d’aventuriers, sont partis il y a trois ans de La Rochelle, et traversent tranquillement le monde. Ils vont rester jusqu’en juin en Polynésie, puis repartir en avion en métropole, leur expérience maritime s’arrêtera – pour le moment- là.
Programme de cette semaine: démontage des voiles, ravitaillement à Uturoa, école, jeux, avec pour objectif un départ pour les Tuamotus dimanche prochain: une belle fenêtre météo avec un vent du NO nous permettrait une navigation confortable. Mais j’ai l’impression que nous serons vraiment sûrs de partir dans cet archipel que quand on y sera arrivés…