Bora Bora

Plongée concert à Bora

On les a vues… de près… de tout près… qui donc? Les baleines…
Car il y a des baleines en Polynésie, pas longtemps: entre août et novembre, elles viennent profiter des eaux chaudes pour se reproduire, ou accoucher! Elles repartent ensuite dans le Sud… Sauf que cette année, elles n’étaient pas encore arrivées, elles se sont fait attendre, les premières ont été aperçues début septembre. Nous en avions aperçu autour de Moorea, puis lors de notre traversée de Huahine: un souffle d’air par-ci, un aileron par là, des présences discrètes qui nous font tressaillir puis bondir sur nos pieds à chaque fois: « une baleine!! Là, là!! ».
Des clubs de plongée proposaient à Tahiti des sorties pour les approcher, et même pour nager avec elles. Nos chemins n’avaient pas pu alors se croiser, mais nous avions déjà tant d’autres choses à découvrir…
Vincent est tombé la semaine dernière lors de la lecture d’un blog de voyageurs suisses sur les coordonnées de Simon, qui propose des sorties à Bora Bora. Pourquoi pas? Nous avons le temps, et si elles sont encore là, profitons-en!
Le rendez-vous est pris, les filles peuvent venir aussi; ce devait être hier, mais finalement décalée à aujourd’hui, la sortie tant espérée, fantasmée, rêvée (au moins pendant deux nuits cette semaine) commence! Sous des augures variés: en plongeant ce matin dans notre nouveau mouillage trop chouette j’ai croisé 3 raies-manta = bon augure; mais quand j’ai voulu replonger un peu plus tard mon appareil photo a pris l’eau = mauvais augure… Mais nous avons notre Go Pro, qui a le temps de charger avant de partir = bon augure… La pythie aurait été plus claire.
J’ai beaucoup préparé les filles pour cette sortie, car il semblerait que les conditions d’approche puissent être compliquées: le bateau à moteur n’a pas le droit d’approcher à moins de 100m du cétacé, nous sommes en haute mer donc il peut y avoir de la houle, et il ne faut pas faire d’éclaboussure en palmant car cela effraie ces grandes bêtes. Les filles sont à fond, parées pour la rencontre!
Nous partageons cette sortie avec un jeune couple américain en anniversaire de mariage, et trois slovènes qui sont dans un monocoque ancré juste à côté de nous; nous sortons par la passe vers l’océan, et les conditions sont idéales: peu de vent, mer très calme, peu de houle.
Et très très vite: une souffle! Deux autres plus loin! Simon met en route son hydrophone qui retransmet le chant de la baleine. Au début on n’y croit pas: ça doit être une bande son qu’il met pour les touristes… Le son est riche, puissant, fait vibrer le bateau dans les graves, nous agresse dans les aigus: c’est vraiment le chant d’une baleine?
Il y a un mâle qui chante depuis trois jours à cet endroit – d’ailleurs seuls les mâles chantent, pour attirer une toute belle (l’inverse de nos sirènes en sorte) -et d’après Simon pas trop farouche: on s’arrête là!
Les instructions pour la mise à l’eau et l’approche: on se glisse dans l’eau (pas de gros plouf), on attend que Simon soit près de la baleine, puis on le rejoint en marche arrière: Tehiva, qui assiste Simon dans la conduite du bateau, nous donne la direction. Cela évite de palmer à la surface, et c’est aussi moins fatigant – 100 mètres à faire dans les vagues, ça fait un bout. Les filles sont dans nos bras, leur coeur bat à toute allure, on y est presque…
L’eau est profonde, pleine de plancton, on ne voit pas grande chose… mais on entend. On vibre. On en prend plein les oreilles: ça craque, ça gargarise, ça cliquète, ça siffle, ça grince, ça assourdit, ça enchante… Nous sommes captivés par cette grosse masse qui se détache petit à petit du fond, queue en l’air, nez en bas, et qui s’en donne à coeur joie. Simon nous fait signe de rester bien groupés autour de lui, nous fait nous décaler… et la grosse masse remonte… Ce n’est pas une grosse masse: c’est gigantesque, formidable, merveilleux, gracieux: il s’est tut, mais nous continuons de frissonner en le regardant s’avancer vers nous, doucement, avec bienveillance. Il nous regarde, nous le regardons, minute bénie et hors du temps, puis il souffle, une fois, deux fois, se détourne, et redescend dans les profondeurs continuer son récital.

La première rencontre me laisse sans voix: je suis submergée par l’émotion, puis, après quelques secondes, je me joints aux cris de joie du groupe. Les filles n’en reviennent pas, elles n’ont pas eu peur, un peu impressionnées, mais complètement sous le charme…
L’après-midi passe vite, la baleine nous fait la grâce de venir nous voir à trois reprises, toutes aussi folles les unes que les autres, puis nous l’abandonnons à ses sérénades. Deux baleines semblent être à l’écoute à quelques kilomètres de là, sautant régulièrement lorsque le mâle remonte; nous les observons de loin, les laissant à leur ballet amoureux.

En rentrant dans la passe, la belle surprise: des dauphins accompagnent notre bateau! Nous sommes à quelques mètres d’eux, puis ils nous gratifient de sauts prodigieux! Triple vrille pour l’un, et saut de plusieurs mètres pour l’autre, même Simon n’avait jamais vu ça…


Nous rentrons au bateau fourbus mais ravis, toutes les attentes qui entouraient cette sortie ont été comblées, et largement dépassées…
Nous invitons les Slovènes pour un apéro bien mérité, afin d’échanger nos impressions, nos photos et nos expériences! Ils nous apportent même un très bon Pinot noir néo-zélandais, exactement ce qu’il nous fallait pour clôturer cette journée complètement folle…

Voici la vidéo de cette sortie, à laquelle je n’ai pas ajouté de musique: j’ai laissé les silences, pour mieux entendre le chant…

Bora Bora

Bora Bora: un paradis?

Bon, réglons ça tout de suite: oui, la lagune de Bora est magnifique, bleu turquoise, le sommet en plein milieu de l’île est splendide et permet des photos incroyables, l’eau est transparente, il y a des beaux poissons… ça pourrait s’apparenter à une idée du paradis, tant vanté sur les magazines et les affiches dans les agences de voyage.

Mais… L’enfer, c’est les autres? Les autres touristes, sans aucun doute. Serait-ce de l’égoïsme que de vouloir garder tout ça pour nous? Certainement. On prend de mauvaises habitudes dans nos mouillages isolés? Peut-être bien…
Retour un peu brutal à la civilisation: les grands hôtels sur pilotis tout autour du lagon impliquent une valse de petits bateaux à moteur, menant leurs passagers aux différents spots de plongée, à terre, sur les motus; les jet-skis s’en donnent à cœur joie, et il y a même un hélicoptère qui fait des rotations en partant des différentes plages des hôtels. Rien de bien méchant en sorte, si ce n’est du bruit et des vagues… et nous ne sommes pas en pleine saison. Comment ça on est des vieux loups de mer râleurs?
C’est vrai que le touriste est roi à Bora, mais à condition qu’il paie: l’arrêté 2442 régissant les mouillages à Bora Bora interdit de mouiller en dehors de certaines zones prédéfinies (jusque là, pourquoi pas). Mais ces zones sont gérées par une compagnie de bouées “Bora Bora Moorings Services” (sans site web) qui, sous couvert de « meilleure gestion du lagon», impose aux bateaux la location de ces bouées (à tarif Bora Bora-esque: 30$ la nuit, 50$ les 3 et 100$ la semaine), en leur interdisant de jeter l’ancre dans ces zones (« On empiète sur le cercle d’évitement »)… alors que certaines sont peu profondes, sablées, donc sans danger pour les coraux – contrairement à la crème solaire dont se tartinent les touristes en plongée…
Bref. Rien de bien grave dans notre microcosme de privilégiés :o)! Mais on avait perdu l’habitude de ne pas faire ce qu’on veut quand on veut et de ne pas avoir à décider à l’avance le nombre de nuits exactes que l’on va passer à un endroit…

Nous avons tout d’abord mouillé au SE de l’île, près du motu Fanfan: nous sommes presque seuls samedi en fin d’après-midi, mais vite rejoints par quelques catamarans de location en provenance de Raiatea. Nous faisons une plongée en dérivante (nous nous laissons portés par le courant avec l’annexe accrochée autour de Vincent) près de la barrière de corail, où nous croisons de très nombreux requins pointes noires, des raies pastenagues, et des petits poissons à deux selles mêlant leurs couleurs vives aux nuances de gris de leurs grands cousins. Le jardin de corail, près du Motu Piti uu Uta, est très joli, nous y croisons de beaux bancs de poissons, ainsi que deux poissons pierres impressionnants (leur piqûre peut être mortelle et en tout cas très douloureuse; on ne s’est pas trop approché).

La plongée en dérivante et le jardin de corail

Nous profitons également de l’immense plage du motu pour tester les raquettes de Beach Ball offertes par Lotus! Les filles ramassent des coquillages, s’ébattent dans les 50 cm d’eau qui s’étalent sur plusieurs dizaines de mètres, un bel après-midi!


Le gestionnaire du parc des bouées nous ayant dit que l’arrêté n’était en fait pas encore en vigueur (mais ses tarifs tout à fait appliqués), nous changeons de mouillage lundi pour nous mettre du côté du Lagoonarium, entre le Méridien et Le Saint Régis Resort. Pas de bouée ici, donc essentiellement des voisins en monocoques qui ont moins la bougeotte.

Nous testons le spot de plongée Anau, au milieu du lagon, qui accueille régulièrement des raies manta; elles n’y sont pas, mais les coraux en revanche nous éblouissent: les massifs sont gigantesques, et descendent jusque dans le tombant, duquel remontent des nuées de poissons scintillants et colorés. Lors de notre première balade nous apercevons une tortue qui s’enfuit à tire de nageoires, mais le lendemain, la chance nous sourit: nous remontons sur l’annexe après une jolie randonnée au milieu des massifs corallien, quand j’aperçois des mouvements d’eau à une trentaine de mètres de nous, au milieu des algues, là où le corail affleure. Vincent m’encourage à me remettre à l’eau, et je palme sans grande conviction dans 50 cm d’eau, rentrant le ventre et serrant les dents. Lorsque je parviens à une eau un peu plus profonde, je vois le bout d’une queue disparaître derrière une patate. C’était donc une tortue… Je continue jusqu’à l’endroit où elle s’est volatilisée, guettant les collines devant moi, admirant une dernière fois toutes les nuances de jaunes et de bleu, puis je fais demi-tour. Et qui est là, m’observant depuis 5 minutes? La tortue, cachée sous un surplomb de corail. Je m’approche doucement, elle continue de me scruter du coin de l’oeil; je commence ma séance photo, elle ne bronche pas. Je tente des signaux vers l’annexe pour communiquer la trouvaille (comment on fait un R avec les mains déjà…), et retourne dans ma contemplation reptilienne. Sous son regard de sphinx, je finis par m’en aller, rencontre Vincent en chemin, le ramène (en hésitant sur le chemin à suivre, c’était à gauche de cette patate? ou de l’autre?), et elle était toujours là, très zen. Finalement convaincue qu’on ne la transformerait pas en soupe, elle sort de son antre et volète de place en place, tantôt marchant sur les polypes, tantôt planant délicatement, nous gardant toujours à l’oeil. Une danse se met à place doucement, la confiance s’installe, et nous nageons de conserve un bon quart d’heure. Elle finit par reprendre sa respiration, puis plonge plus profondément vers le tombant; nous la laissons, reconnaissants de cette belle rencontre.
J’avais promis que je consacrerai une vidéo aux tortues, la voilà ^^!

Plongée à Anau


Nous nous rendons aujourd’hui dans un nouveau mouillage, au SO de l’île, derrière le motu Toopua; Vincent a la bonne idée de couper les moteurs pour la remontée du lagon, nous profitons donc tranquillement de toutes ses nuances de bleu, des profils du mont Otemanu, et des navettes et voiliers charter qui nous doublent à toute vitesse, zut je recommence à râler :o) …
Nous nous arrêtons près de Vaitape, la grande ville de l’île, pour une pause ravitaillement: en diesel et essence tout d’abord (station Total un peu au nord de Vaitape qui accepte la detaxe gasoil), puis un petit tour au super U (pas loin et avec de quoi s’amarrer juste en face) pour faire le plein de poissons, de farine, d’œufs, de fruits, de légumes… nous n’avons pas mangé toutes les courses de début septembre, mais comme nous envisageons de partir directement aux Tuamotus pour plusieurs mois, nous prenons nos précautions! A quoi nous servirait d’être dans les plus beaux atolls du monde si nous n’avons plus de quoi faire des gâteaux au chocolat ^^?

Nous prenons une bouée dans le nouveau mouillage, derrière le motu Toopua, et là: on est bien…. on retrouve les grands espaces, un seul hôtel à l’horizon… et pas de jet-ski… l’impression de retrouver notre paradis perdu…